Il s’agit d’une huile sur toile, précisément datée de 1886, montrant ce qui était alors le village de Suresnes. En effet, cette vue laisse une grande place aux champs qui s’étendent, en partie gauche, sur les coteaux du Mont-Valérien.
On distingue, à l’arrière-plan, un groupement d’habitations qui constituait le bas de Suresnes autour d’une église. La composition est rythmée par la Seine qui serpente dans le paysage et qu’on voit apparaître dans l’angle inférieur droit avec une péniche. En arrière-plan, le long de la Seine alors cachée par les arbres, on distingue une série de cheminées d’usines, fumantes. La partie droite, c’est-à-dire l’autre berge de la Seine, est recouverte de végétation, correspondant à l’emplacement du Bois de Boulogne. Deux zones de réserve dans les deux angles inférieurs attestant du statut de l’œuvre comme étude.
Ce tableau montre un état de la ville où l’implantation des bâtiments prend place autour du clocher de l’église Saint-Leufroy, détruite en 1906. Le plan cadastral de 1855 conservé aux archives municipales de Suresnes confirme ce parcellaire avec de nombreuses constructions dans le bas de Suresnes. Les usines ont ensuite pris place à partir du milieu du XIXe siècle à la faveur de l’essor industriel de la boucle de la Seine. Le bourg de Suresnes, toujours limité à la partie passe de la ville, grossit encore.
La création des lignes de chemins de fer (1839 et 1889), la construction du premier pont en 1841, l’amélioration du réseau routier avec le percement du boulevard de Versailles en 1878, et l’aménagement du fleuve par la construction de barrage-écluses entre 1864 et 1869 puis entre 1880 et 1885 favorisent l’essor de l’industrialisation. A partir de 1860, s’implantent des industries exigeant de grands espaces, souvent polluantes, pour la plupart transférées de Paris. En 1872, on dénombre 19 entreprises sur les quais de Seine.
En 1914, on recense encore une trentaine d’établissements dont peu subsisteront après la guerre. Ces premières industries liées au textile font progressivement place à l’industrie automobile à la fin du XIXe siècle.
La partie haute de la ville restera occupée par les vignes et les champs jusqu’aux alentours de 1920 où les plateaux nord et ouest sont aménagés avec notamment la construction de la cité-jardins.
Cette toile tient une place particulière dans la production de Gaston Latouche car il s’agit d’une des rares toiles de jeunesse qu’il n’ait pas détruites. Il est surtout pour ses représentations de fêtes galantes.